EXCLU GALA – Mylène Farmer raconte le tournage de son nouveau film « Ghostland »

Plus de vingt ans après ses débuts d’actrice dans Giorgino, la chanteuse revient ce 14 mars sur le grand écran, avec Ghostland, un film éprouvant à plus d’un titre… Secrets de tournage.

Film d’horreur, thriller, fantasmagorie ou voyage initiatique ? Difficile, à moins de trahir son épiphanie, de qualifier Ghostland. Pour sa quatrième réalisation après Saint Ange, Martyrs et The Secret, Pascal Laugier réussit un tour de force : fasciner et révulser, effrayer et émouvoir à la fois. Ecrit durant l’été 2015, de façon irrépressible après l’abandon d’un autre projet, et tourné à partir d’octobre 2016, au fin fond du Manitoba, au Canada, son nouveau long-métrage s’ouvre avec l’arrivée d’une mère et de ses deux filles dans une maison héritée. Au bout de quelques minutes, il impose leur violente agression par deux individus, le soir même de leur installation. Puis, suit leurs retrouvailles entre les mêmes murs, quinze ans plus tard. Vera, l’aînée rebelle, semble avoir sombré dans la folie. La cadette Beth, fan de littérature fantastique, a surmonté le traumatisme, en devenant une auteure à succès. Les pistes sont trompeuses. Ca cogne au ventre, au cœur et à la tête…

Môme du pays cannois, cadet d’un couple de commerçants, et, surtout fils de « la contre-culture des années 70-80 », marqué par les étrangetés cinématographiques de Dario Argento, John Carpenter ou encore Paul Verhoeven, Pascal Laugier s’explique : « Je voulais raconter l’histoire d’une vocation, faire le portrait d’une gamine de quatorze ans, qui se construit à travers l’admiration qu’elle voue à des maîtres, le romancier fantastique Lovecraft en l’occurrence. A cela, s’est greffée ma relation parfois houleuse avec mon frère aîné, pour qui tout culte empêchait de s’épanouir personnellement. Beth, c’est un peu moi. »

Pauline Keller, la « mère un peu rock’n’roll, sans mari, mélancolique », a pris les traits de Mylène Farmer. L’annonce de sa participation au film, co-production internationale en langue anglaise, a d’abord surpris. Choc des images : débarrassée de sa légende, peu apprêtée, filmée sous tous les angles et dans tous les états, la chanteuse délivre une prestation extrêmement crédible.

Sa collaboration avec Pascal Laugier s’est décidée au cours d’un échange de textos, début 2016. Le réalisateur ne regrette pas son choix. Il souligne l’investissement de la star, soucieuse d’élaborer elle-même la garde-robe de son personnage ou de répéter ses scènes les plus physiques, avant le premier clap. Mais aussi étonnamment accessible, durant le tournage : « Mylène a compris qu’il fallait qu’elle tisse des liens avec ses « filles » en dehors des plateaux pour que leur relation soit crédible à l’écran.Elle s’est montrée très tendre et très protectrice. »

A son tour, la star s’exprime…

Gala : Vous aviez aimé Saint Ange, Martyrs, The Secret, les premiers films de Pascal Laugier, au point de le solliciter pour diriger le clip de votre chanson City of love, fin 2015. Mais qu’est-ce qui vous a incitée à retenter l’expérience du grand écran, dans un film d’épouvante, plus de vingt ans après Giorgino ?

Mylène Farmer : Le désir de Pascal, son talent de cinéaste, sa certitude que je pouvais incarner le personnage de Pauline… C’est très porteur, très motivant, très rassurant, malgré les doutes… D’autant plus que son scénario était passionnant, très bien écrit, et mon rôle vraiment intéressant à construire.

Gala : La personnalité de Pascal Laugier a donc été déterminante ?

Mylène Farmer : Oui ! Une collaboration, c’est une question de chimie, le premier rendez-vous détermine la suite. J’avais d’abord remarqué un être passionné, immergé dans un véritable univers, sur le tournage du clip de City of love. Puis, le cinéaste s’est imposé, avec son intelligence, sa folie… Pascal est un réalisateur précis, hanté, qui ne lâche rien.

Gala : Comment avez-vous préparé votre rôle : des livres et films de référence ? Un coaching particulier ?

Mylène Farmer : J’ai beaucoup fréquenté les salles obscures et, depuis toujours, j’aime ce genre de cinéma qui nous maintient agrippés au fauteuil ! (Rires) Pour le tournage de Ghostland, Arturo, un répétiteur, m’a aidée à mémoriser mon texte. J’ai ensuite fait corps avec le personnage de Pauline, au gré de mes discussions avec Pascal.

Gala : Vos premières impressions, quand vous avez débarqué au Canada, au fin fond du Manitoba ?

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Mylène Farmer : Ce fut un choc ! Une émotion aussi… Je retrouvais le pays de mon enfance.

“J’ai tourné beaucoup de scènes de nuit. Très vite, le corps se met en pilotage automatique”

Gala : Ghostland vous a mobilisée pendant combien de jours ?

Mylène Farmer : Je suis restée sur place pendant deux mois et, pour ma part, il me faut compter vingt-six jours de tournage en tout, je crois.

Gala : Qu’est-ce qui fut le plus éprouvant sur ce tournage ?

Mylène Farmer : Les heures d’attente entre chaque scène… C’est interminable ! Le tournage lui-même était évidemment très intense, mais les scènes les plus physiques nous donnaient envie de nous surpasser…

Gala : Une scène fut-elle plus mémorable que d’autres à tourner ?

Mylène Farmer : Celle que je ne peux pas décrire, au risque de dévoiler trop de choses… Désolée…

Gala : Dans quel état terminiez-vous vos journées de tournage ? On reste sous tension ?

Mylène Farmer : C’est un cinéma éprouvant, forcément. Mais je sortais de mon rôle en me démaquillant. Un restaurant japonais, miraculeusement posé sur le chemin du retour à mon hôtel, me permettait de reprendre des forces. J’ai tourné beaucoup de scènes de nuit. Très vite, le corps se met en pilotage automatique. Le tout est de rattraper le sommeil manqué pour être d’attaque les jours suivants.

“J’ai conservé les vêtements de mon personnage et le tableau d’un Christ en hologramme”

Gala : Après sa projection au festival de Gérardmer, où il a été primé trois fois (Grand prix du jury, Prix du public et Prix du jury Syfy), le 3 février dernier, Ghostland a été unanimement salué par la critique. Vous attendiez-vous à une telle adhésion ?

Mylène Farmer : Je me doutais que le film ne laisserait pas indifférent. J’ai tout de même ressenti une décharge d’adrénaline et une immense joie, quand le film a reçu son premier prix, celui du public dont la reconnaissance est tellement importante… Puis, le Prix du jury Syfy et le Grand Prix se sont enchaînés. J’étais tellement heureuse pour Pascal et toute l’équipe mobilisée autour du projet. Nous avons vécu une belle émotion ce soir-là.

Gala : Avez-vous gardé un objet en souvenir du tournage de Ghostland ?

Mylène Farmer : Oui ! Les vêtements de mon personnage et le tableau d’un Christ en hologramme, qui trône aujourd’hui dans ma chambre, à Paris. J’étais fascinée par la beauté assez inouïe de cet élément du décor.

Gala : Avez-vous l’impression d’être ressortie différente de ce tournage ?

Mylène Farmer : Différente, non. Heureuse d’avoir participé à un projet singulier, très certainement.

Gala : Le cinéma, c’est une expérience renouvelable dans un futur plus ou moins proche ?

Mylène Farmer : L’avenir le dira. Je n’attends rien. Pour l’instant, je suis plongée dans mon nouvel album…

Propos recueillis par Thomas Durand

Retrouvez l’intégralité de notre sujet sur le making-of de “Ghostland”, confidences et photos exclusives, dans le magazine Gala en kiosque ce mercredi 7 mars.

Crédits photos : Mars Films